« “Foi”, “Espérance” et “Charité” en parfaite harmonie… »
| Aujourd’hui, dans cet article, je vais vous parler du patrimoine campanaire / de cloches de la commune haut-saônoise d’Authoison, puisque c’est en son église que je me suis rendu et ce le lendemain de mon anniversaire : une bonne occasion pour moi de souffler mes 21 bougies et de célébrer l’arrivé de l’automne, en ce week-end des journées européennes du patrimoine !
Moi et mon père avons décidés de nous y rendre, du fait que j’ai pu observer des photos des cloches de l’église mises en ligne, autrefois, sur le site de la mairie.
Cela était dû au fait que des travaux de réfections de l’accès, détérioré par le temps qui passe, allaient voir le jour.
D’une autre part, des membres éloignés de la famille du côté de mon père y habitaient.
Pour se rendre dans cette commune habitant dans les 315 âmes, il faudra nous diriger tout au Sud de Vesoul, la commune étant située à moins de 20 minutes de la préfecture de la Haute-Saône.
Après avoir longé celles de Vy-lès-Filain et de Filain ; où je me suis déjà rendu, il y a environ 2 ans ; et sillonné les routes pittoresques entourées de champs dorés et de forêts verdoyantes, le clocher de l’église Saint-Étienne pointe, en quelques sortes, le bout de son nez.
Ce vieux clocher, datant du XVIIIème siècle ; plus précisément de 1763 ; est de section rectangulaire, ce qui détone des clochers dits « classiques » du département.
Il est coiffé d’un dôme comtois (dit, aussi « à l’impériale » car rappelant la forme de la couronne d’un empereur) composé d’une lanterne ajourée.
L’église est construite au centre du village, à proximité du monument aux morts, ce qui éveilla quelques souvenirs d’enfances à mon papa.
Une fois passé le pas de la porte, la nef s’offre à nous : cette dernière, de style classique, est majoritairement éclairée par certains de ses vitraux de style plus contemporains accentuant la couleur boisée de ses bancs et de ses maîtres-autels ainsi que la couleur beige de ses pierres apparentes formant ses voûtes néo romanes.
| L’accès au clocher est très facile, puisque qu’un escalier en colimaçon fait de pierres, typique de nos clochers comtois, se trouvant sur notre droite nous acheminera aisément jusqu’au premier palier du clocher où se trouvait l’ancienne horloge mécanique, désormais disparue…
Les escaliers et les échelles furent, comme cité plus haut, entièrement refaits à neuf, il y a de cela quelques années car ces derniers étaient en états alarmant de vétusté…
La municipalité décida, alors, de les faire réaliser en métal, afin d’éviter toutes dégradations résultant de l’humidité ou encore des thermites rongeant le bois.
Bien entendu, il en a valu de soi, pour la remise en conformité des planchers vermoulus.
À présent, passons à la description des cloches que comporte le clocher.
| Derrière ses abat-sons de bois à sections demi-circulaires est placé le beffroi, également composé de multiples poutres en chêne.
L’espace où se dernier gît est, plus communément, appelé, la « chambre » des cloches car c’est en ce lieu où ces dernières, ici au nombre de 3, « hébergent » et « cohabitent » entre elles, d’une certaine manière.
Contrairement à ce que nous indique la date inscrite sur le linteau de la porte du parvis, celles-ci ne datent pas / plus de l’époque de la construction de l’église : en effet, elles ont été toutes (re)fondues en l’an 1865.
La commune passa commande envers la fonderie GOUSSEL, basée à Metz (Moselle), Auxerre (Yonne) et Champignueulles (devenu plus tard Champigneulles-en-Bassigny), petit village de Haute-Marne.
Ce sont les frères, fondeurs, comme cités précédemment, dans la région du Bassigny, qui se chargeront de redonner voix au clocher de l’édifice religieux.
Quelques années auparavant, cela a été les cas pour les églises d’Esprels et de Vesoul, situées à quelques kilomètres d’ici.
En effet, cette même fonderie a connu plusieurs commandes haute-saônoises à son actif puisque les décors des cloches ainsi que leur qualité musicale, dans leur grande globalité, étaient, tous deux, excellents.
De même, les cloches de ces mêmes ateliers étaient fondues en profils légers, c’est-à-dire plus légères que d’habitude, par rapport aux notes qu’elles émettent alors les clochers de ce département pouvaient se permettre de se garnir de cloches graves mais plus restreintes, en terme de mensurations multiples (diamètres et épaisseurs, notamment) et de poids.
Maîtriser la fonte d’une cloche en profil léger est toujours resté un art sacré car cloche en profil léger rime avec moins de métal pour la cloche en question, ce qui peut lui donner un son plus « sec. », disons :
la fonderie FARNIER de Robécourt (Vosges) en était particulièrement compétente, comme cela a été le cas aux églises de Franchevelle et Breurey-lès-Faverney, sans pour autant que ces cloches soient désagréables ; bien au contraire, justement ; à l’oreille.
Parenthèse faite, revenons, à présent, aux cloches qui rythment quotidiennement la vie des autetois et autetoises :
Commençant, tout d’abord, par la plus petite de cet ensemble typique du département qui porte le beau nom de « Charité ».
Cette petite cloche, placée au-dessus de sa consœur de taille moyenne, est supportée par deux parties en forme de V inversés que l’on retrouve sur le beffroi dits « en chevalet ».
À vrai dire, il y a une raison qui justifie les ajouts plus ou moins récents de ces deux dernières : il semblerait, d’après des marques de pignons que comporte encore le beffroi d’origine, qu’il comportait, avant modifications diverses effectuées lors de l’ajout des 3 cloches, seulement 2 cloches.
En parlant de ses équipements, son joug d’époque en bois fut remplacé par un joug de fer comprenant ses ferrures (ou « brides ») de fixations et son battant, anciennement en acier dur, par un battant en acier doux, assurant une durée de « vie » plus longue à la cloche.
En tous cas, j’apprécie, personnellement, cette subtile différence qui renforce le caractère mignon de la cloche et donne une singularité propre à cet ensemble !
D’un diamètre légèrement inférieur à 93 cm et d’une épaisseur dépassant de peu les 6 cm, cette petite merveille affiche un poids d’environ 450 kg sur la balance.
Enfin, pour en finir avec sa description, « Charité », tel est son nom, nous chante un beau La♭ de la troisième octave qui se démarque de la sonnerie, de part sa clarté sonore.
Passons, ensuite, à la seconde cloche, appelée, plus communément, cloche « moyenne ».
Cette cloche possède, je pense, les décors les plus attrayants de tous les dames de bronzes composant la sonnerie : du côté de la nef, une frise impressionnante de part son travail de ciselure (ou l’art de l’ornementation du métal sous toutes ses formes) et du fait de sa longueur nous est à prendre idéalement en photo, du fait que cette même cloche rase, d’une dizaine de centimètres, le plancher récemment réhabilité.
D’ailleurs, c’est désormais elle qui tinte les heures, les demi-heures et les 3×3 coups, avant les angélus journaliers, rôle qu’endossait, autrefois, la grosse cloche.
« Espérance » est son nom divin et angélique.
En effet, vous l’aurez remarqué : toutes les cloches, certes, possèdent des parrains et des marraines mais ne portent pas de prénom.
Toutes sont associées à des noms présents dans la liturgie catholique.
Pour en revenir à « Espérance », cette cloche possèdent un diamètre de 1,102 m, une épaisseur effleurant les 7 cm pour un poids avoisinant les 710 kg.
Concernant sa note, le Fa, également de la troisième octave, est la note de son chant céleste.
Elle provoque donc une tierce mineure avec sa plus petite sœur.
Petit détail assez surprenant : sur son joug de bois d’origine, une de ses deux ferrures centrales, en forme de crochet, soutient la cloche alors que la deuxième possède une forme somme toute plus traditionnelle.
D’après des traces significatives que comporte son joug (ou « mouton ») de bois, je pense que cette dernière a dû cédée et être modifiée, par la suite.
Pour terminer en beauté, passons à la plus grande cloche, installée du côté droit, lorsque nous partons du parvis.
Mesurant 1,338 m de diamètre lorsque nous posons notre mètre sur
les lèvres de sa bouche (partie la plus basse de la cloche), d’une épaisseur s’approchant des 9 cm et d’un poids, d’après les dires, de 1.345 t (mon calcul possédant une marge d’erreur d’environ 3 % soit 30 à 40 kg d’écart me donne 1.305 t donc je pense que le poids couramment cité est correct), cette belle pièce de bronze généreusement décorée de diverses ornementations en tous genres est gracieusement nommée « Foi ».
Rien qu’aux vues de ces décors, cette dernière me fait énormément penser au bourdon de l’église Des Fourgs (25 / Doubs), en particulier sa frise aux motifs triangulaires / géométriques, presque exotiques.
Contrairement à ses « collègues de même chambre », cette dernière ne possède absolument pas les mêmes ornementations comme, par exemple, ses anses et ses frises, toutes aussi travaillées mais dans un style bien différent.
Cela est tout simplement dû au fait que cette cloche fut fondue quelques mois plus tard, puisqu’elle porte le numéro « 1587 » alors que les deux autres, de mensurations et de poids plus faibles, sont numérotées, de la plus grande à la plus petite, de 1326 à 1327.
Tout de même 361 commandes de cloches ont été effectuées, entre la coulée de la cloche moyenne et de celle dont nous parlons actuellement !
De plus, ses inscriptions indiquent que « CETTE CLOCHE A ETE FONDUE […] LE ** (car caractère illisible) JUIN 1865. »
En effet, suite à un léger défaut de coulée se trouvant sur le nombre indiquant le jour exact et la roue de volées empêchant l’accessibilité à cette dernière, afin de retranscrire, comme il se doit, ses inscriptions, je ne peux vous donner, avec certitude et précision, la date de fonte de la grosse cloche…
Lorsque nous la tintons au niveau de sa pince, elle émet un beau Ré♭3 qui reste, néanmoins, puissant, malgré son profil léger qui lui donne cette sonorité plus « franche ».
Cependant, d’après ce que nous indique Monsieur Le Maire, sa voix grave ne résonne dans les cieux de la commune d’Authoison que depuis peu de temps car cette dernière n’avait, autrefois, pas été électrifiée avec « Espérance » et « Charité », cette petite touche de « Foi » manquait cruellement aux appels.
Seules ces dernières invitaient les paroissiens du village, des alentours et d’ailleurs à se rendre en l’église pour les divers offices religieux, en volées comme en tintements : le marteau de tintements de la grosse cloche, d’époque et toujours en place, placé sur l’un de ses côtés, ayant été mis Hors Services.
Toutefois, comme la petite cloche, est s’offrit un nouveau battant embellissant sa sonorité qui porte le tout.
| Mon ressenti sur la sonnerie est, évidemment, très positif : c’est une de mes vrais petits coups de cœur !
Tout y est : la qualité aussi bien esthétique que sonore des cloches, l’accord (étant le même que les 3 cloches principales de l’église de mon village qui me bercent, depuis mon enfance) et l’harmonie entre elles, l’originalité de la disposition des cloches / de la composition du beffroi, les noms envoûtants désignés pour chacune, etc.…
J’ai été ravi d’enfin pour mettre en lumière cette très belle sonnerie typiquement haut-saônoise qui me faisait de l’œil, depuis tant et tant d’années !
| Je tiens à remercier, tout simplement mais avec mes remerciements les plus sincères, Mr. Jérémie DENOIX, Maire de sa jolie petite commune campagnarde haut-saônoise qui n’est autre qu’Authoison, pour son autorisation exceptionnelle de réaliser une sonnerie dite « spéciale » ; soit hors des horaires des offices religieux et spécifique à mon reportage ; pour son accueil au sein de son église, pour son accompagnement et pour les ouvertures des portes de l’église.
Sans son approbation, ce reportage envers les cloches du village n’aurait pas eu lieu alors, encore une fois : merci !